La beauté des masques
David Planchenault
Je suis dans ton esprit.
Celui que tu devrais être.
Caché aux tréfonds de tes pensées, tu ne m’écoutes que pour rêver.
Étouffé par tes désirs, écrasé par leurs idées, tu es tellement conditionné que tu es sur le point de m'oublier.
Tu les as tant écoutés que tu revêts leur masque.
Tu te caches sans même que tu le saches. Un voile blanc sur les yeux, les oreilles bien ouvertes, tu t'abreuves du grand cinéma.
Tu joues ton rôle à merveille, la comédia n'a jamais eu autant de succès et Arlequin ne sait plus sur quel pied danser.
Chacun porte son domino et virevolte dans la valse endiablée du grand bal masqué. Champagne et petits fours. Rien n’est laissé au hasard, un scénario parfait pour faire son petit effet.
Mais je reste là.
Toi, dissimulé derrière le neutre, et moi, je subsiste, caché en toi.
Malgré tout le mal qu'ils se donnent, personne n'a encore réussi à m'évincer. Je survis, je patiente, espérant que tu finisses enfin par comprendre. Espérant que tu me sortes de ce public.
Il est temps de faire tomber le rideau et de briser le quatrième mur. Bas les masques, les choses seront tellement plus belles.
Sans ces yeux noirs entourés du visage blanc, sans être neutre pour ne pas être, sans se fondre pour ne rien risquer.
Alors, il suffira de jouer son rôle pour exister.
Nous ne pouvons pas nous contenter d’être spectateur, nous nous sommes trop longtemps contentés de cet esclavage doré. Enfermés dans le confort, aux premières loges, nous avions peur de perdre notre place.
Moi qui ai toujours crié carpe diem, je ne suis même pas capable de montrer cette image qui est mienne.
David Planchenault
Illustration : Allys (Instagram et Facebook) (Encre et aquarelle)